AISLF

Edward A. Tiryakian (1929-2025)

Citoyen du monde

Monique Hirschhorn

C’est lors de la première réunion de bureau après son élection que j’ai découvert qui était Edward Tiryakian, le premier président de l’AISLF à venir d’une université états-unienne. Il ne commença pas la réunion par une discussion sur l’avenir de notre association, mais, considérant sa dimension internationale, il interrogea chacun d’entre nous sur la vision que nous avions des problèmes qui se posaient dans le monde. Cette volonté d’élargir nos perspectives s’est exprimé ensuite dans le choix, en accord avec le vice-président Renaud Sainsaulieu, du thème du congrès de Lyon : « Les nouveaux mondes et l’Europe ».
Un autre souvenir particulièrement fort appartient à ma propre histoire, mais a cependant un rapport avec l’AISLF et avec cette citoyenneté du monde que revendiquait Edward. Quand, lors de ma présidence, le vice-président André Petitat a proposé de faire le prochain congrès à Istanbul en partenariat avec l’université francophone de Galatasarail, Edward, dont la famille arménienne avait dû quitter la Turquie juste avant le génocide, a marqué son opposition et a refusé d’y participer, ce que j’avais parfaitement compris, car il existait, même dans cette université quelques collègues qui se refusaient obstinément à reconnaître le génocide. Mais quelques années plus tard, alors que je résidais en Arménie, il est venu avec son fils nous rendre visite après avoir été sur les traces de sa famille à Istanbul. Ce fut un moment particulièrement émouvant. L’Arménie dans laquelle il nous retrouvait était l’Arménie soviétique où même la langue parlée était différente de celle des Arméniens, mais il a pu rencontrer un historien qui avait été en contact avec un universitaire membre de sa famille. D’une certaine manière, cette visite a réparé la blessure qu’avait pu lui causer le choix d’Istanbul.
Citoyen du monde Edward était aussi un historien de la sociologie, grand admirateur de Durkheim et on lui doit de nous avoir inciter au congrès d’Evora à créer un comité d’histoire de la sociologie dont il a été un membre très actif. À ce titre, il est aussi venu à notre invitation participer à la journée d’étude organisée le 11 décembre 2017, par l’université Paris Descartes et par l’AISLF en hommage à son ami Georges Balandier, un moment fort qui lui a permis de retrouver Paris et une partie de ses amis de l’AISLF avec lesquels il était toujours en relation épistolaire.

Monique Hirschhorn, présidente d’honneur


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