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L’informel ou la face cachée de la précarité : le cas des chiffonniers de Tunis

Hassane Mouri

Hassane Mouri, L’informel ou la face cachée de la précarité : le cas des chiffonniers de Tunis, Tunis, Institut supérieur des sciences humaines et sociales de Tunis et Éditions Latrach, mai 2016.

Des hommes, des femmes et des enfants, dès l’aube se précipitent dans les rues et sur les décharges pour ramasser de quoi subsister. Ils ramassent les objets de valeur ou jugés comme de la sorte pour les vendre après avec des prix dérisoires, ou du moins avant l’avènement des déchets recyclables à la fin des années 1990.
Des mains invisibles débarrassent et libèrent les villes de ses ordures, une population nocturne mais aussi en plein jour qui se déplace d’une décharge à une autre, dans les rues et partout ou il y a de quoi subsister : une population déchirée entre un métier marginal et stigmatisé mais reste l’expression la plus forte de l’exclusion et de la pauvreté sans aucune reconnaissance ou sans aucune considération. Les acteurs invisibles, latents et dissimilés jouent un rôle primordial pour débarrasser l’environnement des déchets les plus nuisibles et à risque.
Les chiffonniers ou les récupérateurs offraient un service public généreux dans le domaine écologique dont l’impact est positif sur les plans économique, social et environnemental. Cette activité prolifère dans le silence et dans l’informel malgré son importance, elle est dépourvue de toute forme de reconnaissance sociale, juridique ou même économique. Les chiffonniers ne sont pas reconnus comme des prestataires de services publics ou des « travailleurs verts », ils n’ont pas un lien clair avec les industries du secteur formel. C’est une main-d’œuvre immense au bas de la chaîne de recyclage. Les récupérateurs, l’appellation générale adoptée à la 1re Conférence Mondiale des Récupérateurs en 2008, demeure une qualification plus ou moins neutre loin de la stigmatisation et l’étiquetage social et peut aussi mettre en valeur ce métier noble pour l’environnement. Le parcours des récupérateurs est de divers profils, des personnes travaillant dans les décharges ou fouillant dans les ordures dans les rues aux collecteurs improvisés qui vendent des matières recyclables à des intermédiaires ou des récupérateurs occasionnels.
Certains d’entre eux se sont transformés en entrepreneurs organisés ; c’est une forme « d’ascension par le plastique », c’est cette frange sociale qui combattait la stigmatisation et l’indignation du métier.

Hassane Mouri est enseignant chercheur en sociologie de développement au département de sociologie à l’institut supérieur des sciences humaines de Tunis Université El Manar. Il travaille sur le thème « environnement et développement », il a coordonné la publication d’un ouvrage collectif Eau, lien social et dynamiques locales en 2012, il a publié aussi de nombreux articles sur l’environnement, la question de l’eau et le développement local en Tunisie et à l’étranger.

Hassane Mouri est membre de l’AISLF.


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