AISLF

Marcel BOLLE DE BAL (1930-2025)

Marcel Bolle de Bal, un sociologue atypique et heureux

György Széll

En 1958, Marcel Bolle de Bal, qui est alors jeune chargé de recherche à l’Institut de sociologie de l’Université libre de Bruxelles où il va faire toute sa carrière, participe à la création de l’AISLF par Georges Gurvitch et Henri Janne. En 1971, il est élu au bureau de l’AISLF et, en 1978, après deux mandats, vice-président. Président en 1982, il organise en 1985 à Bruxelles, le XIIe Congrès « 1984, et alors ? l’Individu et la machine sociale ». Un thème qui aura un grand succès et qui, aujourd’hui, prend encore plus de résonance. Par la suite, il restera, en tant que président d’honneur, y compris jusqu’à l’extrême fin de sa vie, très actif à l’intérieur de l’Association dont il conservera vivante la mémoire.

Bien que juriste de formation (il était titulaire d’un doctorat en droit et d’une licence de sciences économiques et financières), c’est la sociologie et la psychosociologie qui vont devenir ses disciplines de référence. Mais, à la différence de la plupart de ses collègues - et cela fait de lui un sociologue atypique - , il ne va pas s’enfermer dans une spécialité. Fort actif sur le plan scientifique (son CV comprend plus de 300 publications !), il va traiter de questions très diverses : de la sociologie générale à l’éducation en passant par les ressources humaines, la politique en Belgique, et en Europe… en utilisant comme fil rouge une idée qui lui est particulièrement chère : celle du paradoxe. Mais c’est la création du concept de reliance en tant que « réalité duelle portant en elle son contraire complémentaire, à savoir la déliance » qui constitue de son point de vue l’apport le plus décisif à la connaissance sociologique. Les deux volumes qu’il lui a consacrés en 1996, Voyages au cœur des sciences humaines. De la Reliance, tome 1 Reliance et théories, tome 2 Reliance et pratiques, réunissent plus de quarante contributions de sociologues issus de différents pays, dont un d’Edgar Morin.

Outre son activité scientifique et ses nombreuses responsabilités académiques, il a eu également un engagement politique. Membre du parti socialiste belge, il a été pendant dix-neuf ans conseiller communal à Linkebeek (1965-1973, 1989-2000) et a écrit pendant de longues années des rubriques dans un hebdomadaire. Mais l’on ne saurait évoquer sa mémoire sans parler de la Franc-maçonnerie à laquelle il a adhéré, non seulement en tant que membre de l’Université libre de Bruxelles, mais aussi du fait d’une conviction profonde qu’il n’a jamais mis en question. Initié en 1962 au sein d’une loge affiliée au Grand Orient de Belgique, il a été également par la suite, membre actif durant une vingtaine d’années, d’une loge du Droit humain. Son dernier ouvrage, publié en 2023, Les spirales initiatiques d’un vieux franc-maçon, rédigé alors qu’il était presque aveugle, fait figure de testament dédié à cet engagement qui a structuré toute sa vie. Enfin, il faut aussi mentionner son épouse, historienne de l’art, franc-maçonne elle aussi, qui était une interlocutrice toujours attentive et qui lui a permis jusqu’au terme de sa vie de rester un sociologue heureux, comme il se définissait lui-même, en 1999, dans Les adieux d’un sociologue heureux. Traces d’un passage.

György Széll, professeur émérite de sociologie, Université d’Osnabrück, Allemagne


Mentions légales


AISLF site version 8.2 - © 2013-2025 Jean-Yves Le Talec pour l'AISLF